24 mars 2014
Le 20 janvier
© Sylvain Maestraggi / extrait de Waldersbach
« Peu lui importait le chemin, tantôt montant, tantôt descendant. Il n’éprouvait pas de fatigue, mais seulement il lui était désagréable parfois de ne pas pouvoir marcher sur la tête. Au début il se sentait oppressé, lorsque les pierres se mettaient à rouler, lorsque la forêt grise s’agitait à ses pieds et que le brouillard tantôt engloutissait toutes les formes, tantôt découvrait à demi ces membres gigantesques, il se sentait le cœur serré, il cherchait quelque chose comme des rêves perdus mais il ne trouvait rien. Tout lui paraissait si petit, si proche, si mouillé, il aurait aimé mettre la terre derrière le poêle, il ne comprenait pas comment il lui fallait tant de temps pour dévaler une pente et atteindre un point éloigné ; il pensait devoir tout enjamber en quelques pas. » [1]
« Er ging gleichgültig weiter, es lag ihm nichts am Weg, bald auf – bald abwärts. Müdigkeit spürte er keine, nur war es ihm manchmal unangenehm, dass er nicht auf dem Kopf gehn konnte. Anfangs drängte es ihm in der Brust, wenn das Gestein so wegspang, der graue Wald sich unter ihm schüttelte, und der Nebel die Formen bald verschlang, bald die gewaltigen Glieder halb enthüllte; es drängte in ihm, er suchte nach etwas, wie nach verlorenen Träumen, aber er fand nichts. Es war ihm alles so klein, so nahe, so nass, er hätte die Erde hinter des Ofen setzen mögen, er begriff nicht, dass er so viel Zeit brauchte, um einen Abhang hinunterzuklimmen, einen fernen Punkt zu erreichen; er meinte, er müsse alles mit ein paar Schritten ausmessen können. » [2]
Plusieurs hivers de suite, le photographe Sylvain Maestraggi a parcouru la vallée du Ban de la Roche dans les Vosges alsaciennes sur les traces de Lenz du nom de la nouvelle éponyme et inachevée de Georg Büchner. La postface du livre Waldersbach (à paraître aux éditions L’Astrée rugueuse) est signée Jean-Christophe Bailly.
Ce dernier avait prononcé dans le cadre du salon de lecture de la Bibliothèque nationale de France une conférence consacré à Büchner et à son Lenz.
[1] Georg Büchner, Lenz, traduit par Henri-Alexis Baatsch, Paris, Union générale d’éditions, 1974.
[2] Georg Büchner, Sämtliche Werke Breiefe und Dokumente, Band 1, Frankfurt am Main, Deutscher Klassiker Verlag,1992.
Classé dans: 7.10 Littérature allemande, VARIA
Commentaires